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 [Contes] Le manteau mal coupé

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Valdoise Châtillon

Valdoise Châtillon


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Date d'inscription : 12/05/2008
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MessageSujet: [Contes] Le manteau mal coupé   [Contes] Le manteau mal coupé EmptySam 22 Aoû - 18:57

A la Pentecôte, le roi Arthur veut tenir la cour la plus riche qu'il n'ait jamais tenue en sa vie; il y mande les rois, ducs, comtes et barons qui tiennent ses terres et, comme une foule de tournois doivent s'y dérouler, il prie tous ses féaux de se faire accompagner de leur dame ou de leur amie. Une fois tout ce joyeux monde hébergé dans les nombreuses salles du château, les trompettes royales ont donné le signal des premières joutes et l'on se prépare à de grandes liesses. C'est compter, cependant, sans la fée Morgane, jalouse de la beauté de la reine Guenièvre et de l'amour que lui porte Iancelot du Lac. Dépitée de n'avoir pas été invitée à la fête, ne va-t-elle pas s'interposer, par enchantement, en trouble-fête?

Alors que les grandes tables sont déjà mises pour le dîner, le roi s'est appuyé à une fenêtre qui donne sur la grand-rue de Camelot et s'entretient avec messire Gauvain, son neveu. Et voici qu'ils aperçoivent, venant vers le château, un gentilhomme à cheval maintenant devant lui un coffre sur l'encolure de la bête. On l'accueille à l'entrée, on le fait monter à la salle et le nouveau-venu, genou à terre devant le monarque, dit:

- Sire, je suis envoyé auprès de vous par une très haute Dame qui vous tient en estime et vous prie d'accepter un don pour lequel vous lui saurez éternellement gré.

- Je l'agrée, dit le roi.

Et le gentilhomme de le remercier au nom de la Dame et de délacer les courroies qui enserrent le coffre. Il en tire le manteau le plus richement orné qu'on ' n'ait jamais vu au royaume de Grande-Bretagne.

Vêtement enchanté, sans doute, puisque produit d'une fée et dont le pouvoir magique doit faire découvrir l'infidélité des dames et des demoiselles en se montrant trop long ou trop court pour toutes celles qui ont été déloyales à leur époux ou à leur ami.

- Sire, précise le messager, ma Dame vous prie de faire essayer ce riche vêtement à toute dame et demoiselle ici présente et celle qui le portera ni trop long ni trop court en sera sa vie durant honorée.

Le roi se montre quelque peu perplexe, mais sire Gauvain lui dit:

- Sire, puisqu'il en est ainsi, nous allons placer le manteau sur chacune de ces dames.

Messire Gauvain s'en va quérir la reine et dit:

- Madame, le roi vous demande de vous rendre dans la salle avec vos suivantes car il veut voir laquelle est la plus belle afin de lui remettre un présent.

Entourée de sa noble compagnie, la reine paraît donc devant son époux, qui déploie le manteau et lui dit:

- Madame, je remettrai en cadeau ce riche présent à celle d'entre vous à laquelle il siéra le mieux.

La reine, frappée de la richesse du tissu, le désire aussitôt de tout son coeur et le fait placer sur ses épaules pour l'essayer. Hélas, il lui est trop court par devant quoique de bonne longueur par derrière.

Messire Yvain, le fils du roi Urien, qui la voit changer de visage à s'apercevoir du sourire forcé dessiné sur certaines lèvres, lui dit:

- Madame, il m'est avis que ce manteau n'est pas assez long pour votre taille; faites-le donc essayer à cette demoiselle qui est à vos côtés.

La jouvencelle le passe incontinent mais, hélas, le vêtement lui est trop court d'un demi-pied. Messire Keu, le plus grand railleur de la maison du roi se permet de dire à la reine:

- Madame, vous êtes tout de même plus loyale qu'elle!

Piquée au vif, la souveraine lui demande:

- Messire Ken, qu'entendez-vous par là?

Le chevalier ne peut guère se dérober et lui conte l'histoire de Morgane et de l'enchantement qu'elle attache au manteau. La reine, sage entre toutes, cache sa colère afin de ne pas encourir plus de honte et part d'un éclat de rire à ce nouveau jeu sournois de la méchante fée. Et quoique pleine de dépit, elle dit tout haut:

- Or ça, mesdames, qu'attendez-vous, maintenant que j'ai commencé la première?

Messire Keu se trouve soudain pris de pitié feinte pour ces pauvres créatures, on le comprend hésitantes, et leur dit:

- Avancez, mesdemoiselles, on connaîtra enfin aujourd'hui la fidélité que vous assurez à ces pauvres chevaliers qui endurent tant de souffrances pour vos beaux yeux!

L'apostrophe de Ken ne fait qu'augmenter le trouble qui s'est emparé des dames et le roi plein de condescendance dit au messager de Morgane de replacer le manteau dans le coffre sous prétexte qu'il est fort mal coupé. Mais le jeune homme se rebiffe et, sous l'oeil bienveillant de Ken, lance tout haut:

- Sire, je n'aurais cure de le faire; promesse de roi doit être tenue!

Alors, dames et demoiselles sentent la sueur monter à leur visage et la couleur disparaître de leurs pommettes. Chacune veut faire l'honneur à sa voisine de le lui faire essayer la première et la reine apercevant messire Keu qui tant aime railler lui dit:

- Messire Ken, posez-le donc sur les épaules de votre femme sans plus caqueter et nous verrons s'il lui va bien.

Le chevalier va quérir sa femme, une des premières suivantes de la reine et qui passait pour la plus fidèle des épouses, et lui dit -

- Venez, ma mie; aujourd'hui sera reconnue votre loyauté envers ma personne; prenez ce manteau sans hésiter et jetez-le sur vos épaules; il me semble vraiment coupé à votre taille.

La belle répond:

- Messire Ken, m'est avis qu'il faudrait plutôt le laisser à ces dames, qui vont me trouver bien arrogante et orgueilleuse.

- Qu'importe, ma mie, je vous jure ma foi que même si elles devaient enrager, vous revêtirez ce manteau avant elles.

Et sans dire davantage, il le lui place sur le dos. Hélas, le vêtement se raccourcit subitement par derrière si fort qu'il ne couvre pas le jarret et par devant laisse le genou à découvert.

- Sainte Marie! s'écrie Brehus-sans-pitié.

Ken ne sait quelle contenance adopter et ceux qui l'entourent se soulagent d'aise à voir son air penaud, à lui qui s'est tant gaussé des autres.

Cependant, les dames comprennent qu'elles devront toutes subir l'épreuve et s'en montrent fort dolentes. Messire Lucan-le-Bouteiller se tourne vers le roi et lui dit:

- Pourquoi ne pas essayer ce manteau à l'amie de messire Gauvain?

Ce dernier qui doute depuis fort longtemps de la fidélité de la belle n'est guère étonné de constater que le vêtement se trouve trop long d'un pied et demi par derrière et qu'il est ouvert jusqu'aux genoux sur le côté. Voyant la belle toute honteuse, messire Ken, qui vient de retrouver sa gouaille, la prend par la main et la conduit auprès de sa femme en lui disant:

- Mademoiselle, tenez-vous près de mon épouse car vous êtes aussi femme de bien qu'elle!

Le roi qui voit toute la cour rire de bon coeur ne peut se contenir lui-même et pour continuer le jeu s'adresse à l'amie de messire Yvain.

- Pourquoi ce manteau ne serait-il pas le vôtre?

Pitié, il traîne par devant et n'arrive qu'au cul par derrière!

- Mon Dieu, s'exclame l'écuyer du roi, voici une terrible épreuve, il est bien fou celui qui en femme se fie!

Le roi qui se pique au divertissement appelle ensuite l'amie de Percevalle-Gallois et l'invite, bien qu'elle s'en montre fort contrariée, à passer le terrible habit. Or, dès qu'il est sur elle, les attaches se rompent et il tombe à terre. Baissant la tête, maudissant en son coeur l'auteur d'une si déplaisante manoeuvre, elle va prendre place aux côtés des autres. Sans doute, le roi finit par se lasser à ce triste jeu et serait bien aise de l'interrompre mais le messager le somme de tenir une promesse tenue devant toute sa baronnie.

Messire Ydier a son amoureuse à côté de lui et il ne croit pas qu'il soit dans le royaume compagne plus fidèle. Il la prend par la main et lui dit:

- Ma mie, vous savez le grand amour que je vous ai toujours porté et la confiance que je vous ai témoignée. Vous allez confondre tous ces médisants et surtout messire Ken dont les plaisanteries sont de fort mauvais goût.

- Mon ami, répond l'interpellée, pourquoi devancer l'ordre du roi?

Elle se prête cependant au jeu et revêt le manteau sans aucun empressement. jamais habit ne lui va si bien par devant et la compagnie pense trouver en elle la fleur des dames; mais pour le derrière, quelle pitié! l'étoffe ne recouvre même pas ses fesses! Messire Ken, qui ne peut se tenir de parler parce que messire Ydier s'est souvent moqué de lui, s'exclame:

- Qu'en dites-vous, compère? Il est, sans doute, bien caché celui à qui le cul de la jouvencelle se montre!

Finalement, le messager voyant que son manteau ne sied à personne demande qu'on aille dans toutes les chambres du château pour voir s'il ne s'y trouve pas encore une personne. Sur l'ordre du roi Arthur, l'écuyer s'empresse de parcourir les appartements et découvre sur un lit une demoiselle malade depuis plusieurs jours.

- Mademoiselle, lui dit-il, levez-vous bien vite car le roi vous demande en la grande salle. J'attendrai derrière cette tenture que vous soyez habillée.

La jeune personne retrouve à la cour son ami messire Karados Brise-Bras qui se sent ému à la voir si pâle, lui qui se trouvait déjà heureux de la savoir malade. Son amour est si profond qu'il ne saurait supporter la moindre trace de déshonneur pour elle et il lui conseille:

- Ma belle, si tu éprouves quelque doute, abstiens-toi de revêtir ce manteau car 'e ne pourrais jamais souffrir ta honte. Le doute est souvent plus facile à supporter que la vérité!

L'écuyer qui s'aperçoit de son trouble lui dit:

- Pourquoi vous tourmenter de la sorte? N'en voyez-vous pas là déjà plus de deux cents dames assises sur ces bancs que l'on croyait, ce matin encore, les plus loyales du pays?

Encouragée, la belle saisit le manteau et le place sur ses épaules. A l'ébahissement général, le vêtement se trouve à sa taille comme s'il avait été coupé par le plus habile couturier du monde et le messager lui dit:

- Mademoiselle, votre ami est le plus heureux homme que je connaisse et je vous laisse le manteau en gage de votre fidélité.

Depuis ce jour, il sera porté par l'amie de Karados jusqu'à sa mort et, après l'ensevelissement, il sera déposé en un lieu secret que seule la fée Morgane connaît.

[Source: http://forum.lesroyaumes.com/viewtopic.php?t=176585&postdays=0&post…]
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